Qui est l’autre? D’où vient-elle au-delà du voile porté ou non?

De même que la foi chrétienne n’est pas uniforme, qu’on la vive dans une tradition ou une autre; de même la foi musulmane n’est pas standard, d’un pays du monde à l’autre, d’un courant à un autre. Il n’existe pas une seule identité musulmane ni une seule identité chrétienne. Chaque tradition a ses nuances qui laissent apparaître des divergences internes à chaque religion, les incompréhensions ne sont pas toujours là où on les imagine!

Quel sens pour ces face-à-face?

En premier lieu, il s’agit de développer une connaissance réciproque, qui permet de dépasser nos craintes et aide à sortir des clichés ou fausses croyances sur la foi d’autrui. Cela contribue à faire naître un climat de paix et de non-violence et à inventer des passerelles d’hospitalité et de sororité. C’est l’occasion de découvrir les valeurs éthiques qui pétrissent les religions et révèlent des points de rapprochement, notamment à ce qui touche à l’entraide et à la solidarité. Les échanges favorisent l’acceptation de l’authenticité de l’engagement religieux de l’autre – même s’il diffère du sien – par sa droiture, sa dimension éthique, la fidélité de sa vie religieuse. Souvent les paraboles de Jésus sont nos supports pour explorer valeurs et actions à promouvoir. Vivre ces moments dans une maison de quartier redonne un espace à Dieu au cœur de la société.

Quelle place pour la théologie?

Il existe de multiples zones de divergences; par exemple une pierre d’achoppement vécue: la Trinité vue comme polythéisme en islam. Après avoir dit notre position, nous ne cherchons pas à régler ce type de sujets qui pourraient nous diviser. La concurrence est bannie de nos dialogues, afin de ne pas ouvrir la brèche des conflits. Nos échanges passent par le partage du comment agir et incarner notre engagement religieux, dans notre vie quotidienne pour le bien de tous. Pour se rencontrer au niveau spirituel, il est important d’être ancrée dans sa foi, ce qui apaise les réticences et facilite la relation avec d’autres croyantes. L’important est de ne pas faire l’apologie de sa propre religion. Humblement, nous reconnaissons que dans chacune de nos traditions, il y a des textes de violence et d’intolérance vis-à-vis des autres; nous voulons aller au-delà de ces potentielles hostilités pour mettre en avant miséricorde et pardon. Nous cheminons, au fil de l’année, à travers nos fêtes religieuses propres, en nous réjouissant ensemble et en découvrant toujours plus, ce qui est essentiel pour les unes et les autres.

Le respect mutuel est primordial. Sans déprécier la place du Christ, mais au contraire, en suivant ses pas et les voies relationnelles qu’il a lui-même initiées, nous voulons vivre la liberté d’ouverture à tous. Nous sommes témoins de la grâce de Dieu à l’œuvre, dans le cœur de celles qui vont à lui, par d’autres chemins que ceux de notre foi. L’appréhension d’être évangélisée ou islamisée est dépassée par la création de ponts de confiance, sans gommer ou minimiser nos différences. Ensemble, nous faisons le postulat que chacune est une créature merveilleuse de Dieu, au-delà de son appartenance religieuse.